I – La Mort et l’Argonaute

Les Indociles I - Le Surgissement

« Ils vous ont échappé pour rentrer tout seuls dans le préau ? Mais enfin, Mademoiselle, ils ont quatre ans ! »

Jason Marcheur fut parmi les premiers, mais l’ignora ; des quelques heures qui changèrent sa vie il ne devait garder aucun souvenir.

lune sur champ de bléIl n’avait alors que quatre ans. C’était un soir de printemps parisien et il dînait, comme d’habitude, à la cuisine, pour pouvoir ensuite se coucher tôt.
 Jason était donc assis devant la table bar, occupé à balancer ses jambes pendant que sa maman retirait du feu, puis versait dans une passoire les grains de blé soufflés tirés d’un paquet tout neuf. Il regardait l’emballage : les Omasanty de la pub ! plutôt content de reconnaître le grand O rouge et ovale, même s’il ne savait pas encore toutes les autres lettres. Le monde, comme la cuisine, était bien rangé. D’un côté, l’école, sa partie classe et sa partie récréation ; de l’autre côté la maison, ici la sécurité de la cuisine, bientôt celle de son lit, plus douillette et pourtant plus effrayante, mais aussi celle de Carousse, son ours blond qui l’attendait sur son oreiller. Et surtout, la sécurité de maman elle-même qui faisait glisser à présent les grains de blé dans son assiette, des longs cheveux blonds de maman qui lui chatouillaient la joue quand elle se penchait vers lui, et chaque fois qu’elle lui racontait l’histoire de l’autre et grand Jason, celui des temps anciens, c’était toujours comme ça qu’il s’imaginait la Toison d’or…
 Maman avait mis un morceau de beurre salé à fondre sur les grains de blé. Jason arrivait bien à les faire tenir au creux de sa fourchette qu’il prenait à l’envers comme une espèce de cuiller, comme maman le lui avait montré. Il avait peur que ce soit trop chaud, mais non, c’était juste bien. Il mangeait, il balançait ses jambes, maman lui disait de ne pas donner de coups de pied dans la chaise, et il voulait lui raconter comment ils avaient joué à chat à la récréation, et comment il venait d’attraper Victor juste au moment où la maîtresse leur avait dit de rentrer en classe : Victor était content de rentrer parce qu’il ne voulait pas du tout être le chat…
 Et soudain, il sentit toutes les pensées qui étaient dans sa tête s’envoler ensemble d’un seul coup comme les mouettes en Bretagne en voyant arriver une très grosse vague, et voici que la vague explosait. Il n’y avait pas de pensées dans cette vague, juste une sensation : celle d’être si petit dans cette cuisine, cerné par un monde immense, et l’effarement de ne jamais l’avoir su jusque-là. La vague se retira, et Jason devint un banc de sable lissé aux formes effacées par la mer, désormais méconnaissable ; il se sentit comme cette fois où il avait bu la tasse et où, en sortant la tête de l’eau, il s’était mis à pleurer dans un monde où il ne reconnaissait rien. La cuisine était la même, et pourtant elle était étrangère. Maman n’avait pas bougé, et pourtant elle était loin. Un jour il était sorti de son ventre, et maintenant elle ne savait pas ce qui se passait dans sa tête à lui, et elle ne pouvait pas l’empêcher de donner des coups de pied dans la chaise. Il se dépêcha d’enfourner une nouvelle fourchetée de blé pour que le goût fasse revenir le monde de tout à l’heure ; la nourriture était bonne et familière, mais par la fenêtre de la cuisine, le soir, lui, n’était pas bon, il balançait de l’ombre dans les branches du grand marronnier à l’angle de l’avenue. Derrière, Jason était obligé de le savoir, même en mangeant, même en se concentrant sur les bons grains de blé à mâcher, il y avait les grilles du parc des Buttes-Chaumont que l’on fermait à la tombée de la nuit. Derrière, le parc désert continuait à exister avec toutes ses allées, toutes ses pelouses, toutes ses pentes, ses cascades en ciment et ses grottes pleines d’escaliers, il existerait pendant très longtemps en étant complètement noir…
 Jason n’avait plus faim. Il avait hâte maintenant de quitter cette cuisine ; il voulait s’enfoncer dans son lit avec Carousse ; entre les draps et l’oreiller, il retrouverait un monde à sa taille.

Et quand Jason s’endormit, il rêva de la Mort Noire.

Jason la mort et CarouseIl était en classe à coller des gommettes comme s’il était encore en petite section ; dans son rêve c’était normal, tout le monde s’appliquait en silence à coller des gommettes sans dépasser ; même la maîtresse était assise à son bureau, lointaine et vague, et au lieu de venir se pencher sur l’épaule des enfants, elle aussi collait ses gommettes dans son cahier à elle. Il aurait voulu en faire autant, seulement voilà, assis près de lui, à la même table, il y avait la Mort Noire. Il ne la voyait pas, il n’osait pas tourner la tête pour la regarder, mais il savait qu’elle était sur le siège d’à côté. Et en plus, ils n’avaient qu’un cahier pour deux ; il approchait sa main pour coller les gommettes, et sur la page ouverte il y avait cette main noire aux ongles crochus…

Il se réveilla en sursaut.
 Il était dans son lit, pas en classe. Et s’il avait chaud comme ça, ce n’était pas parce que les gommettes étaient trop sèches ; c’était à cause de cette couverture… Il la sentit enfin glisser sur le sol et entama un de ses dialogues silencieux avec Carousse :
 «  J’arrive pas à dormir.
 ‒ Tu veux qu’on joue au toboggan ? » demanda Carousse aussitôt.
 Depuis toujours, c’était le jeu préféré de l’ours : perché au sommet des genoux de Jason, il se laissait glisser jusque sur son ventre.
 « Non, c’est nul, c’est pour les bébés !
 ‒ C’est pas pour les bébés ! protesta Carousse. Tu sais bien que plus tu grandis, plus le toboggan est haut.
 ‒ Même si j’étais grand comme papa, il serait pas si haut que ça. Et de toute façon y a que toi qui t’amuses ; moi, je fais rien.
 ‒ Alors, on joue à la grotte des ours ? »
 Jason hésita. Dans la grotte des ours, il mettait le drap sur leurs deux têtes ; il y avait plein de neige dehors ; ils étaient au chaud pour passer l’hiver, et en sécurité. Mais est-ce qu’il avait envie, là, tout de suite, d’avoir un drap par-dessus sa tête sans savoir ce qui pouvait se passer dehors ? Et si une main soulevait ce drap ? Toujours en silence, il cria presque : « Non, je veux pas ! J’ai fait un vilain cauchemar. Il y avait la Mort Noire. J’ai peur qu’elle entre dans la grotte.
 ‒ C’est impossible. Il n’y a pas de méchant dans la grotte des ours. »
 Carousse avait l’air tranquille, un peu comme quand on suce son pouce, qu’on ne sait rien d’autre que le goût du pouce et qu’on se sent bien comme ça. Mais Jason avait passé l’âge de sucer son pouce
 « La Mort Noire, elle est toute puissante ! Elle peut aller où elle veut. Même, dans mon rêve, elle était entrée dans l’école. »
 Cette fois, Carousse ne répondit rien. Jason le scruta à travers l’obscurité : il restait là, inerte, indifférent, et au lieu de partager son angoisse, semblait sur le point de se rendormir
 Un soupçon terrible lui traversa l’esprit
 « Mais toi, la Mort Noire, tu sais même pas ce que c’est ! Et si elle venait pour me tuer, tu l’empêcherais pas, elle te ferait pas peur, parce que tu es une peluche, et les peluches, ça meurt pas sauf si on les coupe en morceaux, et personne le fait ! Alors, ça sert à rien que tu restes dans mon lit avec moi ! »
 Et il repoussa l’ours, presque décidé à se lever et à essayer d’aller dans le lit de papa et maman ; il savait comment il serait reçu, mais au moins pendant les minutes suivantes, le monde serait à nouveau dominé par des puissances qui n’avaient rien à voir avec la Mort Noire.
 Carousse réagit enfin et éclata en violents sanglots : « Je veux pas aller par terre ! Je veux dormir avec toi ! Tu m’avais dit que tu serais toujours mon copain pendant toute ta vie, même si tu devenais grand et que tu te mariais avec ta blonde à toi ! »
 Jason, touché, le serra contre lui. Assis à présent dans son lit, il éprouva un moment contre sa joue le chatouillis familier de la fourrure douce, huma la bonne odeur de Carousse, son « odeur de lit » ‒ de sueur d’enfant, de salive, de larmes, mêlées à un peu de poussière. Carousse, qui était toujours son copain, n’était plus un protecteur ni une sécurité, mais un plus petit qu’il fallait protéger. « D’accord, tu dormiras avec moi. Seulement moi je me lève. Viens, on va surveiller à deux qu’il n’y a pas la Mort Noire. ».

La mort HélèneQuand Hélène Marcheur fut sur le point d’aller se coucher, elle s’appliqua, comme toutes les nuits, à pousser le plus silencieusement possible la porte de la chambre où dormait son petit Jason, afin de pouvoir le border, le recouvrir, l’embrasser sans le réveiller. Elle le faisait machinalement, encore absorbée par les échanges avec les invités repartis une demi-heure plus tôt. Mais Jason n’était pas dans son lit, et une forme mystérieuse se dressait près de la fenêtre, celle d’un petit vieillard, ou d’un adulte nain, ou d’un fantôme dans les rideaux… Elle le reconnut seulement quand il se retourna vers elle, l’ours Carousse sous le bras. Dans la pénombre, il ne lui sembla même pas surpris ou heureux de la voir.
 « Qu’est-ce que tu fais là, mon poussin ? Va vite te recoucher, tu vas prendre froid ! »Il ne parut pas l’avoir entendue. Il la laissa traverser la chambre, et attendit qu’elle le prenne par la main pour déclarer : « Maman, moi, je veux pas mourir ! »
 Sur le coup, ce fut la contrariété qui domina ; quelque chose comme : « Pourquoi les enfants se posent-ils toujours des problèmes métaphysiques quand vous avez dû faire partir un lave-vaisselle après minuit et que vous devez vous lever à sept heures le lendemain ? »
 « Mon chéri, tu ne vas pas mourir ! Pas avant très longtemps… Tu risques surtout d’attraper un rhume ! Tu as fait un cauchemar ? » Le plus rapide aurait été de le prendre dans son lit pour dormir elle-même, mais à tous les coups, cela allait réveiller Guy et le rendre furieux… « Tu veux que je te raconte une histoire pour te rendormir ?
 ‒ Oui, la Toison d’or ! »
 Excellente idée, se dit Hélène. Est-ce que la Toison d’or n’était pas censée conférer l’immortalité ? Elle n’avait jamais insisté là-dessus ; Jason aimait surtout entendre parler des exploits de « l’autre Jason », mais cette nuit, cela pouvait être aussi l’occasion de le rassurer. Comme il était sage, son petit bonhomme, comme il se laissait mettre docilement au lit, avec quelle attention il l’écoutait ! En déroulant les aventures des Argonautes, qui étaient désormais motivées et orientées par la conquête de l’immortalité, elle se disait qu’après tout, elle ne détestait pas forcément la manie loufoque de son mari consistant à choisir des prénoms dans la mythologie grecque ‒ même si elle continuait à plaindre son beau-fils, boutonneux, compassé et affublé du prénom Ulysse : « Jason » était quand même moins ridicule… Si elle avait été moins préoccupée par ses soucis d’adulte, sans doute aurait-elle remarqué la singularité de cette séquence nocturne, sans doute aurait-elle pu puiser plus tard du réconfort dans le souvenir que la métamorphose de Jason avait commencé par ce beau moment de complicité entre elle et lui… Mais pendant qu’elle racontait, Hélène était restée dans la soirée, dans les regards admiratifs et envieux suscités par l’annonce de la promotion de Guy, dans les perspectives qu’ouvrait son nouveau poste ; le cauchemar et l’insomnie de Jason constituaient un interlude insolite qu’elle savait gérer, alors les Argonautes en quête de l’immortalité se fondirent avec des dizaines d’autres souvenirs du même récit dans d’autres circonstances.
 Jason apaisé ne luttait plus contre le sommeil : il allait rêver de la nef Argo, de l’amitié des compagnons, des îles lointaines… Elle sortit sur la pointe des pieds.

plante sur sable

Le lendemain en classe, Jason était fatigué. Pas de gommettes à coller, heureusement, mais on devait apprendre une comptine sur le printemps, et colorier des œufs de Pâques. Il se ranima à la récréation, et proposa à ses copains de jouer à la Toison d’or. Les autres ne savaient pas ce que c’était : il leur expliqua avec enthousiasme qu’ils pouvaient tous être des Argonautes et s’embarquer avec lui à la recherche de cette fourrure dorée du bout du monde, qui les rendrait immortels. Et avant d’arriver au bout du monde, il y avait des tas d’aventures dans des tas de pays extraordinaires.
 Martin avait beau dire que puisque la terre était ronde, elle ne pouvait pas avoir de bouts, les autres voulurent partir quand même lorsque Jason leur expliqua que tous les plus grands héros pourraient le suivre dans la nef Argo. Oui, même les filles, elles aussi pouvaient être des héros ; sinon, ils ne seraient pas assez nombreux. Coralie, aussitôt, voulut être Elastygirl. Victor affirma qu’il était « Ronne Ouislet, le meilleur ami d’un Ripoteur » dans l’histoire préférée de son grand frère ; Jacob voulut être Bob l’Éponge, et finalement, Martin vint les rejoindre « puisque c’était un jeu », à condition d’être le capitaine Crochet. Victor ne trouvait pas que c’était un héros, mais Jason décida que les méchants aussi pouvaient être des héros, que c’était pratique d’avoir l’habitude des bateaux et que le crochet pourrait toujours servir. Il n’y avait plus qu’à monter dans la nef. Jason en profita pour initier ses compagnons au vocabulaire marin des récits, à coups de « babords », de « tribords » et de « sabords ». Lui était la « proue », le capitaine Crochet la « poulpe » ; chacun tenait les épaules de celui de devant et la nef se déplaçait d’une île à l’autre, risquant parfois de chavirer, se redressant à grand renfort de cris et de rires. En chemin, elle embarqua d’autres Argonautes qui insistèrent pour y monter à leur tour : on trouva sur un îlot le capitaine Haddock, alias Johnny, de grande section !, et sur une immense plage, Mulan (Lauriane).
 Puis, chacun sauta hors de la nef et accosta au Pays des Portiques, habité par des géants. On ne pouvait pas s’enfoncer dans ce territoire, jonché de grandes formes d’acier hérissées de barres, aux lumières clignotantes ; Bob l’Éponge s’y risqua et se fit refouler par une géante plus agressive que les autres, qui parla de l’envoyer au coin s’il osait toucher au dispositif anti-attentat. Il fallait pourtant leur dérober la carte des îles indispensable à la suite du voyage. Elastygirl finit par l’attraper du bout de son bras étirable, et la lança à Martin qui put enfin utiliser son fameux crochet pour harponner en plein vol le vieux parchemin.
 Les Argonautes avaient la carte ! Ils repartirent au milieu d’une mer de plus en plus houleuse ; des tempêtes lointaines faisaient entendre des sonneries stridentes, on croisait des bancs de cachalots en rangs par deux. La nef Argo avait maintenant deux « poulpes », les capitaines Crochet et Haddock, qui se disputaient la place du fond en agitant frénétiquement leurs jambes de pieuvres, tandis que Bob l’Éponge, distancé, les suivait de son mieux, tout gonflé d’aspirer l’eau et criant qu’il allait tout avaler. On allait vers les deux dragons Charib et Si, là ! et si on parvenait à passer entre eux, on pourrait entrer dans la Mer du Bout du Monde. En attendant, l’océan autour d’eux s’était calmé, mais le capitaine Haddock avait disparu, emmené de force par les Lotophages de grande section. Le capitaine Crochet était d’ailleurs plutôt content d’être la seule « poulpe », même s’il n’était plus derrière car Bob l’Éponge le tenait par l’épaule.
 Avant qu’ils aient atteint les dragons, qui étaient les portes du préau, l’impensable arriva : une Cyclopesse au milieu de la mer ! Elle pouvait marcher sur l’eau ! Elle se planta devant eux, les fixant de son œil unique, et vociféra : « Enfin, qu’est-ce qui vous prend ? En classe tout de suite ! » Les Argonautes furent terrifiés, mais Jason, leur chef, ne perdit pas courage : « Virez de bord ! On va passer sur le côté ! » Il entama la manœuvre sur la droite ; Mulan tomba à l’eau, se mit à pleurer, redevint la petite Lauriane grondée, punie, et vagissant comme un bébé. Est-ce que les autres le suivaient encore ? Ronne Ouislet avait lâché ses épaules et paraissait tout démonté, sur le point de redevenir Victor. Elastygirl tirait fort vers la droite, et le capitaine Crochet, saisi par l’ennemie, se débattait comme un beau diable en criant : « Je suis une poulpe ! »
 Les épaules de Jason étaient libres. Il fonça vers les dragons. Il voyait les portes du préau, et surtout, l’image de Charib : une sorte de dromadaire gigantesque, agenouillé, tendant une tête de terroriste cagoulé et à demi aveugle. Bon, il était méchant, mais ce n’était pas la Mort Noire. Si, là ! était plus vague : une impression de danger et en même temps, la nécessité de s’en approcher pour pouvoir passer. Il sentait plus qu’il ne les voyait Elastygirl et Bob l’Éponge qui couraient derrière lui pendant que la Cyclopesse criait : « Arrêtez tout de suite et revenez ici ! » Jason n’était pas fou : il savait que c’était sa maîtresse. Seulement dans le jeu, c’était une Cyclopesse, comme les portes étaient Charib et Si, là !
 Dans l’histoire de sa maman, il fallait se faufiler entre les dragons. Ici, il fallait s’adapter, puisqu’entre les dragons c’était un mur. Il essaya de passer par Charib, mais c’était fermé. Il longea le mètre de mur, conscient que la Cyclopesse venait à bout de Martin la poulpe et que la cour vide était un cul-de-sac. Sa seule chance… Si, là ! Il poussait la porte, et les deux derniers rescapés de la nef Argo arrivaient droit sur ses talons !
 Et soudain, ce fut l’émerveillement. L’impossible réalisé. Ils étaient seuls, si petits tous les trois, devant ce préau immense qui accueillait les enfants de l’école les jours de pluie, tout entier dans la pénombre avec quelques rayons de soleil oblique : la Mer du Bout du Monde ! Elastygirl et Bob l’Éponge, d’abord presque intimidés, se lancèrent dans de longues glissades sur le sol étincelant : où était la Toison d’or ? Ils allaient la prendre ! Ils allaient être immortels, rien qu’eux ! Grâce à son bras étirable, Elastygirl pouvait la dénicher dans n’importe quel angle de la pièce !
 Jason regarda autour de lui. Et il sut alors avec une certitude entière que ce n’était pas si simple. Ils avaient éliminé tous les obstacles extérieurs. Il restait l’essentiel. Il restait la Mort Noire. Mais il faisait jour, ils étaient trois, ils avaient pris courage : peut-être pourrait-il l’affronter, à présent ?
 Seulement, c’était trop tard : les grandes personnes leur barraient la route. Elles criaient, elles grondaient, elles se disputaient même entre elles : « Vous me dites qu’ils vous ont échappé pour rentrer tout seuls dans le préau ? Mais enfin, Mademoiselle, ils ont quatre ans ! Puis-je savoir ce que vous avez fait, pendant ce temps, du reste de votre classe ? » Bob l’Éponge redevenait Jacob, Coralie, grondée, baissait la tête, pas contrite du tout, ravie au contraire de ce jeu si amusant. Jason était forcé de rentrer en classe sans Toison d’or, sans savoir s’il serait un jour plus fort que la Mort Noire.

La mort HélèneCe fut seulement quelques jours plus tard que l’institutrice, à bout de nerfs, convoqua M. et Mme Marcheur pour les informer que Jason semblait avoir un problème psychiatrique. Hélène Marcheur qui, bien sûr, était venue seule, n’en crut pas ses oreilles. Heureusement, d’autres parents d’élèves la rassurèrent : cette institutrice ne savait pas s’y prendre avec sa classe. Pour les uns, elle laissait faire aux enfants n’importe quoi ; pour d’autres, elle passait son temps à les gronder et les punir, il y avait des pleurs tous les jours. Jason ne tarda pas à changer d’école…

lune sur champ de blé

un texte d’Isabelle Cani.

6 Commentaires

  1. Antoine Cani

    On a hésité à garder ou non cette police cursive pour les enfants (après en avoir cherché d’autres pas trouvé qui fassent aussi enfantin). Si vous trouvez la lecture fatigante, il y a la version pdf où tout est en police standard (et vous pouvez aussi faire des suggestions si vous connaissez une autre enfantine qui serait plus lisible).

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    • Isabelle Cani

      Merci, Magali ! Moi, je ne serais pas contre essayer, mais ça dépasse mes compétences techniques et à vrai dire, je n’ai pas embauché Antoine à vie faute de moyens suffisants… (Clin d’oeil qui devrait apparaître ici.) Il faut déjà que j’apprenne à modérer et pour commencer, je ne trouve pas les émoticônes… (Visage décourage devant mon incompétence.)
      La question de fond derrière celle d’Antoine serait : qu’est-ce que vous, les lecteurs sur site, pensez de l’idée de mettre une police cursive pour les points de vue de petits enfants (il y en a un à nouveau dans le tome II, « D’herbe verte et d’eau braque ») ? Et de façon générale, qu’est-ce que vous pensez du fait de changer de police de caractère quand on change de point de vue

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      • Antoine Cani

        Pour les émoticones il faut juste les mettre en texte avec une parenthèse et ils apparaissent : ) = 🙂 enfin en enlevant l’espace.
        Pour la police oui c’est un peu compliqué si c’est pas une déjà incluse (faut aller installer le fichier dans le bon répertoire, ajouter quelques lignes au modèle, en plus de changer le css) enfin comme j’ai proposé je le ferai le cas échéant si beaucoup de gens en préfèreraient une autre.

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  2. Simone

    J avais lu le livre, apprécié e. General et sans m attarder. Je viens de relire chaque chapitre comme un épisode de série, en espaçant mes lecture, et là j ai trouvé un charme nouveau, des atmosphères dans lesquelles se plonger., une série de nouvelles indépendantes dans ce monde en évolution, qu on découvre par touches en « pattes de mouche ». Pourquoi ne pas continuer la publication par chapitre? Sans attendre la parution finale, mais en nous permettant de nous infiltrer progressivement dans ces mutations ?

    Réponse
    • Isabelle Cani

      La réponse à ce commentaire est à lire à la fin du tome II.

      Réponse

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